Des insectes dans nos assiettes. C’est ce que propose Micronutris, une société basée à Saint-Orens-de-Gameville, dans la banlieue toulousaine. L’entreprise fait un pari risqué en produisant et en commercialisant des insectes alimentaires. Leur intégration dans le quotidien des Français cherche à apporter une réponse aux problématiques d’alimentation du futur.
Protection aux chaussures, Cédric Auriol arpente les allées d’un hangar sans fenêtres et surchauffé. Les chants des grillons résonnent dans cet espace de 650m² dédié à l’élevage d’insectes. Et il y en a pour tous les goûts. Grillons et vers de farine sont les deux espèces phares de Micronutris, mais la société effectue des tests sur des criquets, afin d’étendre la gamme de produits proposée aux consommateurs. A l’étage, une chaleur suffocante et une moiteur digne des pays tropicaux. Des conditions optimales pour l’accouplement, la ponte et le développement de ces insectes.
Cédric Auriol ouvre l’un des conteneurs. Des millions de vers de farine grouillent dans ce bac de croissance, éclairé d’une lumière chauffante et rempli de boîtes d’œufs qui servent d’alvéoles de ponte. « A Micronutris, on s’occupe de l’ensemble du cycle d’élevage du grillon et du ver de farine. Le premier est porté à maturité en 8 semaines, le ver en 12 semaines », explique le dirigeant de la start-up toulousaine. Nourris à partir d’aliments issus de l’agriculture biologique et principalement de produits locaux, cet élevage respecte les enjeux de l’environnement tout en proposant une alternative durable aux modes de production et de consommation traditionnelles.
Une partie de la production de Micronutris est transformée pour être consommée. L’autre reste dans le circuit d’élevage, en jouant le rôle d’insectes reproducteurs. L’entreprise produit aujourd’hui une tonne d’insectes par jour.
Vers de farine et grillons à la carte
Sur une table basse dans le coin « salon » de l’entreprise trône des boîtes remplis d’insectes. Desséchés, grillons et vers de farines doivent être dégustés à l’apéritif, en lieu et place du traditionnel bol de cacahuètes. Le gérant montre l’exemple et prend une poignée pleine de vers. Un rictus au bord des lèvres, il avale les insectes. « Ca fait un an que j’en mange tous les jours, je suis rodé », déclare-il en souriant. Les vers craquent sous la dent, un croquant intéressant pour le palais, mais ça s’arrête là. Niveau goût, on repassera.
Cédric Auriol dégaine alors une autre arme ; des chocolats et des macarons. Des couleurs acidulées – du jaune, du vert, du rouge – avec un grillon trônant fièrement sur le haut du gâteau. « Nous avons plusieurs partenaires, dont un chocolatier qui soustraite nos produits ainsi qu’un chef étoilé qui va mettre sur sa carte des plats à base d’insectes d’ici peu », annonce-il.
Pour séduire le marché français cependant, le gérant du seul élevage d’insectes comestibles en Europe mise sur une transformation complète du produit. Pour cela, il s’est aidé d’industriels et de sa propre équipe de biologistes-entomologistes pour développer une barre protéinée à base de farine d’insectes. Les programmes de recherche sur ce produit finissent dans deux semaines ; la commercialisation est prévue pour fin 2013.
La création d’un nouveau marché dans une phase ascendante
Après un an d’ouverture, Micronutris dresse un bilan positif de ce nouveau concept, décrit comme une « aventure » par le créateur de la start-up. Depuis un an, il affirme avoir vu une évolution des mentalités et avoir reçu un retour positif des consommateurs. « Il y a trois types de personnes qui viennent acheter nos produits. Ceux qui essayent pour la première fois et que ça amusent, ceux qui ont déjà essayé et qui veulent retenter l’expérience mais aussi des gens qui se sentent concernés par une alimentation plus saine et respectueuse », détaille Cédric Auriol.
Les entomophages – personnes qui mangent des insectes – sont 2,5 milliards à travers le monde. L’entreprise a pour vocation de se développer en France mais aussi dans toute l’Europe. « On s’arrêtera là, on ne va pas apprendre aux Asiatiques à manger des vers », commente le gérant, en riant. Récompensé en février par le prix des Inn’Ovations, Micronutris a pour challenge de faire passer sa production à 15 tonnes par an au cours de l’année 2013.
Une révolution est en cours, celle d’une consommation naturelle et durable pour répondre aux besoins croissants de rendements en termes d’alimentation.
Pour plus d’infos ou commander des produits en ligne : www.mangeons-des-insectes.com
Camille Wormser