Cette année, l’aéroport Paris le Bourget accueillait le 50e Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace avec, en tête d’affiche, le nouvel Airbus A350, concurrent direct de Boeing dans la catégorie des avions long-courrier. En dehors des avions de combat, le Salon ouvrait cette année ses portes à un type d’aéronef particulier : les drones.
Les drones représentent-ils l’avenir des armées de l’air mondiales ? Certainement. À l’image du drone nEUROn de l’entreprise d’armement Dassault, fruit d’une collaboration étroite entre la France, la Suède, l’Espagne, l’Italie, la Grèce et la Suisse. Projet exclusivement européen, ce n’est pas une maquette qui aura été présentée cette année mais bien un démonstrateur du drone de combat opérationnel. Le coût estimé de ce programme est de quatre cent six millions d’euros. Classé Secret Défense, le drone est exposé au public sous une grande bulle hâlée protégée par des barrières et de nombreux agents de sécurités. Dans un futur relativement lointain, nEUROn s’ajoutera aux pilotes d’avions de chasse et une toute nouvelle façon de faire la guerre verra le jour. À priori, les drone ne remplaceront pas les pilotes tout de suite, les premiers avions furtifs devrait être livré en 2030, en remplacement des avions Rafale qui seront en fin de vie. Ils représenteront un appui non négligeable mais diablement onéreux. Les anglais, eux, ont crées Taranis et un projet entre Dassault et le constructeur BAE Systems – nom de code Demon – est toujours d’actualité. Il vise à associer les technologies de nEUROn et de Taranis en vue de créer un démonstrateur de drone de combat armé plus efficace. Pour l’instant, ce contrat consiste en une étude conjointe entre les deux entreprises qui se terminera en 2014. Ensuite, l’élaboration d’un démonstrateur sera d’actualité. Les enjeux de cet aéronef sont clairs, il s’agit de (re)lancer l’Europe sur le marché des drones de surveillance et de combat alors qu’elle accuse un retard significatif dans ce domaine face aux américains. Les drones de l’armée française, par exemple, sont proche de l’obsolescence et ont montré toutes leurs limites lors des opérations au Mali (drone Harfang). Le ministère de la Défense a même commandé une douzaine de drones Reaper aux américains pour pallier à cette situation critique.
L’utilisation de drones ne se cantonne toutefois pas à l’unique domaine militaire, les recherches pour les applications civiles de telles technologies sont aussi d’actualité.
La plupart des exposants interrogés sont d’accord sur ce point : les drones ont un potentiel civil illimité. Pour Christophe Arnoux, venu présenter le drone Patroller de Sagem (SAFRAN), ces aéronefs peuvent avoir toutes les applications imaginables, il envisage même que les drones remplacent les avions de transports. Loin d’être utopique, cette supposition est tout à fait plausible, des rames de train autonomes étant déjà en service. En effet, leur structure ainsi que la technologie embarquée permet de s’affranchir des contraintes des avions avec pilote. De plus, le trafic pourrait être directement géré par ces drones entre eux, garantissant une plus grande fluidité des transports aérien. Monsieur Arnoux pense que les pensées devront obligatoirement évoluer pour que les drones puissent s’installer durablement dans le paysage aéronautique mondial, chose qu’il estime inévitable et souhaitable.
Plus maniables, plus légers, plus économes en énergie… Ce sont là autant d’avantages non négligeables dans un monde en constante évolution. Nous sommes allé à la rencontre du Dr.-Ing. Bert Schweitzer, manager général de l’entreprise aérospatiale allemande Schweitzer Ingenieur GMBH, qui partage cette opinion. Le drone de cette entreprise, nommé Universal, est uniquement voué à un usage civil et le Docteur Schweitzer a bien insisté sur le fait que, selon lui, les drones civils sont l’avenir du monde aéronautique. L’appareil qu’il nous a présenté est un condensé de technologie de pointe en fibre de carbone. Équipé d’une caméra dernier cri issue du domaine militaire, Universal est parfait dans le cadre de la surveillance des installations électriques et des pipelines. Autres applications : la surveillance des feu de forêts, la sécurité civile ainsi que la photographie des milieux marins et de tout autre milieu écologiquement en danger que l’on voudrait surveiller. Ce ne sont là que quelques idées d’utilisation parmi une infinité de possibilités, ces appareils pouvant s’adapter à de nombreuses situations. Non autonome, Universal est contrôlé à distance par un technicien qui reçoit images et informations en continu. Ses avantages nous ont été clairement énoncés par Monsieur Schweitzer, il peut aller là où il serait dangereux que l’homme se rende. À terme, il souhaiterait que les drones puissent surveiller les centrales nucléaires, pour éviter des catastrophes telle que celle de Fukushima. L’architecture de l’appareil lui permet de voler là où l’oxygène manque avec une autonomie de vol supérieure à dix heures couplée à une altitude maximale estimée autour des 6.000 mètres.
L’usage de drone à des fins commerciales ?
Domino’s Pizza Royaume-Uni a relancé ce concept il y a peu : livrer un produit alimentaire à l’aide d’un drone téléguidé. Les clients commandent leur pizza et se font livrer quelques minutes plus tard par l’aéronef. Si ce projet peut être intéressant, les personnes que nous avons interrogées au Salon pensent tous que cela n’est rien d’autre qu’une bêtise. Un officier de l’Armée de l’Air sur le stand du ministère de la défense nous a expliqué qu’il n’y croyait pas. À titre indicatif, il nous a présenté le drone IT180 d’Infotron utilisé comme unité de reconnaissance et de surveillance par l’Armée dont le prix s’élève à 200.000 euros pièce. Prix élevé mais utilisation extrêmement simplifiée. En effet, le drone est manié sur un écran de contrôle à l’aide d’une… manette de jeux vidéos. Il n’y a donc aucun obstacle technique, une formation de quelques jours suffisant effectivement à maitriser l’engin. Pour une entreprise de vente de produits alimentaires, c’est cependant un investissement conséquent et totalement irréaliste. D’ici une dizaine d’années, lorsque les drone se démocratiseront, un tel scénario sera envisageable. Pour l’instant c’est un formidable coup de pub’ qu’a réalisé la filiale britannique du groupe.
Exception faite de ces drones de haute technologie, nous observons depuis quelques années l’apparition de drones-jouets. Contrôlables à l’aide d’une tablette ou d’un smartphone, ces jouets haut de gamme permettent d’enregistrer photos et vidéos de qualité par une simple pression du doigt. L’entreprise Parrot, géant sur le marché du drone grand public (500.000 ventes à travers le monde), était présente au Bourget avec ses nouveau modèle de quadricoptères en plus de son drone Sensefly (destiné aux professionnels pour de la cartographie aérienne : agriculture, industrie minière, conservation de la nature…). Dans une grande vitrine protégée d’un filet, une démonstration surprenante de ces appareils avait lieu. En effet, au rythme d’une musique, une dizaines de ces drones se livraient à un ballet aérien, le tout avec une synchronisation épatante. Disponibles pour quelques centaines de dollars, ces appareils trouvent de plus en plus d’acheteurs et de nombreuses entreprises l’ont compri.
Le marché des drones est en pleine expansion : drones de combats, drones civils et drones grand publics sont appelés à jouer un rôle important dans l’avenir de l’aéronautique mondiale. Les plus grandes entreprises vont donc devoir rivaliser en ingéniosité pour créer les appareils les plus perfectionnés possible et s’approprier le plus de parts possible d’un marché s’annonçant comme très lucratif. Rendez-vous au prochain salon pour constater toutes ces évolutions.
Simon Sainte Mareville