Depuis septembre 2013 fleurissent de nombreuses offres 4G des différents opérateurs téléphoniques. Promettant chacun des performances toujours plus impressionnantes – comme la possibilité de partager une vidéo en streaming alors que nous sommes en train de l’enregistrer –, les différents acteurs se lancent dans un combat sans merci pour obtenir le plus de parts d’un marché s’annonçant plutôt lucratif. Les enjeux sont importants mais certaines zones d’ombres demeurent, qu’en est-il vraiment de cette nouvelle évolution des télécommunications ?
L’avenir des télécommunications
Dans un monde où tout va de plus en vite, il fallait rendre l’outil le plus important de milliards de personnes plus efficace pour optimiser les communications. Cette optimisation concerne la rapidité d’exécution et un délai de réaction de plus en plus court : fini en théorie l’attente de plusieurs secondes avant l’ouverture d’une page internet, tout est instantané. Force est de constater que les chiffres annoncés sont mirobolants avec des débits théoriques de données compris entre 115 et 150 Mbit/s, théoriques ou plutôt maximaux : la réalité tourne en fait autour d’un respectable 100 Mbit/s.
Les forfaits 4G proposent aux consommateurs une augmentation des quantités de données comprises dans les offres. Là où les offres 3G proposaient entre 1 et 5 giga-octets de données utilisables, la 4G augmente les débits mensuels de 6 à 20 giga-octets selon les offres. Cela octroie la possibilité aux clients de consommer plus de contenus en tout genres : films, musiques etc. Ces derniers se téléchargent désormais en quelques instants, de quelques secondes à quelques minutes, impliquant des quantités de données échangées presque inimaginables. Il faut donc proposer des appareils robustes capables d’assurer plusieurs années de services, chose rare aujourd’hui, la plupart des smartphones n’ayant pas plus d’une année – deux au maximum – de durée de vie, sans entrer dans le débat de l’obsolescence programmée. Ces appareils devront donc également être améliorés pour atteindre une durée de vie et des performances toujours plus satisfaisantes. C’est un point essentiel lorsque l’on sait que les appareils dits compatibles 4G coûtent tous plus de 400 euros, représentants donc un véritable investissement financier. Les consommateurs réclament plus de fiabilité, de stabilité mais aussi de performances à des tarifs toujours plus compétitifs.
Certains opérateurs anticipent déjà la 5G qu’ils comptent proposer en 2020, annonçant des débits d’un giga-octet par seconde – le téléchargement d’un film ne prendrait qu’une ou deux secondes –, soit près de dix fois plus que l’offre actuelle de la 4G. Il faut savoir que depuis l’essor des smartphones et autres tablettes numériques, le nombre d’appareils connecté augmente chaque jour plus que le précédent. Selon l’entreprise télécom suédoise Ericsson, il y aura environ 50 milliards d’appareils connectés au réseau à l’horizon 2020. Le risque de saturation est donc extrêmement important, sachant qu’aujourd’hui, presque tous les objets électroniques que nous possédons sont connectés et ce en permanence. Pour répondre à ce risque bien réel de saturation, il est crucial pour les opérateurs d’optimiser les technologies proposées, la communication étant en effet le point le plus essentiel de nos sociétés modernes, tant sur le point de vue social que sur celui plus large de la vie des États. Les enjeux géopolitiques sont donc d’une importance capitale.
Les télécommunications en France
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ou ARCEP – nous montre clairement cette progression : 74,8 millions de cartes SIM sont en activité sur le territoire français au second trimestre 2013, soit 4,3 millions de plus qu’en 2012. On constate également que les français ont passé 34,3 milliards de minutes au téléphone et envoyé plus de 48 milliards SMS toujours au second trimestre 2013 : imaginez alors les chiffres en Chine, en Inde ou aux États-Unis où les populations sont bien plus nombreuses. Enfin, les chiffres concernant les données internet sont tout aussi édifiants : les clients, au cours de la même période, ont consommé plus de 35 mille téra-octets – soit 35 millions de giga-octets – de données, en progression de 60% par rapport à 2012. Le secteur se porte donc plutôt bien, même si l’on constate une baisse des revenus que nous pouvons associer aux nouvelles offres téléphoniques qui, hors 4G, proposent de nombreux prix inférieurs à vingt euros par mois.
Le déploiement de la 4G en France et ses polémiques
L’un des points les plus problématique de l’apparition de la 4G dans l’hexagone reste la non-compatibilité du réseau avec les différents téléphones qui existaient déjà sur le marché. Les grands constructeurs ont rapidement proposé des appareils répondants aux normes mais à un coût élevé que ce soit la gamme Lumia de Nokia, Galaxy de Samsung ou Iphone d’Apple. De plus, les forfaits sont proposés à des tarifs rédhibitoires : entre 34,99 et 159,99 euros pour le plus cher. C’était sans compter Free qui a décidé de proposer un forfait 4G avec 20 giga-octets de données à seulement 19,99 euros par mois, soit au même prix que les actuelles offres 3G. Véritable coup de massue pour les » trois grands » Orange, SFR et Bouygues Télécom qui comptaient sur cette innovation pour se relancer, un an après avoir subit la terrible concurrence du même Free et de son désormais célèbre forfait à deux euros par mois sans engagement. Si son fondateur Xavier Niel a révolutionné les coûts de la téléphonie mobile, beaucoup pointent du doigt le manque de qualité du service : fréquentes périodes de saturation du réseau entraînant une baisse du débit si ce n’est l’incapacité même de joindre un proche où de surfer sur le web. Aux heures de pointe et dans les grandes agglomérations, l’accès à la 3G est plus que restreint. Nombreux sont alors ceux s’interrogeant sur la capacité de l’entreprise à investir ce nouveau secteur qu’est la 4G. À titre indicatif, Free n’a déployé que 700 antennes 4G – alors que son parc d’antennes 3G n’est pas encore totalement opérationnel – contre 3419 pour Orange, 718 chez SFR et enfin 4655 pour Bouygues Télécom qui reste l’opérateur couvrant le secteur le plus vaste et de la façon la plus stable possible.
Vient ensuite l’aspect sanitaire, nombreux sont ceux qui critiquent les nouvelles antennes qui augmentent le taux d’exposition aux ondes électromagnétiques, exposition que nous savons néfaste sur l’organisme. Selon le rapport rendu le 15 octobre dernier par l’Agence nationale de sécurité sanitaire – ANSES –, une exposition prolongée à un trop fort taux d’ondes conduirait à une augmentation thermique des tissus. Pourtant, les effets à long terme – s’ils existent – n’ont toujours pas été prouvés. Devant ces risques, l’Organisation mondiale de la santé avait qualifié les ondes de » peut-être cancérigènes » en 2011.
Enfin, la polémique la plus violente relative au déploiement 4G est dû à l’association de consommateurs UFC que choisir. Ces derniers ont décidé de déposer plainte contre Orange et SFR pour désinformation. Sillonnant la capitale française à bord d’un véhicule équipé du matériel nécessaire à l’étude du déploiement 4G, une équipe de l’association a analysé la couverture 4G proposée. Les résultats montrent qu’Orange et SFR ne couvrent respectivement que 79,3 et 75% du territoire parisien, bien loin de ce qui est annoncé sur leurs site internet. De plus, les débits observés en dehors des agglomérations sont inférieurs de moitié à ceux annoncés, aggravant donc les inégalités de la couverture hertzienne française et sans qu’aucune mention n’y soit faite sur le site d’Orange. Ils demandent plus de clarté et une transparence totale des opérateurs sur les zones couvertes ainsi qu’à propos des débits réellement disponibles. Orange a rapidement réagi en clarifiant ses informations : la 4G est disponible dans tous les arrondissements parisiens et le débit maximal de 150 Mbit/s est uniquement proposé par l’opérateur du fait de ses installations. Alain Bazot, président d’UFC que choisir, est vite monté au créneau sur son blog en rappelant qu’Orange et SFR n’ont aucunement répondu aux fondements de la plainte qui n’a donc pas été retirée.
Faut-il se laisser tenter ?
Si vous vivez en agglomération et que vous consommez beaucoup de contenus internet depuis votre mobile, le passage à la 4G peut se révéler très intéressant car extrêmement rapide, sur Youtube par exemple, vous ne souffrirez d’aucun temps de chargement. À Paris, l’ensemble du territoire devrait être couvert d’ici 2014 favorisant donc une très bonne qualité des services. Pour autant, les forfaits 3G se révèlent être suffisants et même plus intéressants que leurs homologues 4G pour une utilisation plus ou moins intensive – jusqu’à 5 giga-octets de débit par mois –. En effet, le rapport qualité/prix étant plus intéressant, il n’y a aucun intérêt à rejoindre ce nouveau réseau pour l’instant. Il ne faut également pas oublier que passer à la 4G nécessite un portable ou une tablette compatible, cela engendrant des coûts supplémentaires importants. Enfin, avec l’arrivée de Free sur le marché, on peut s’attendre à une baisse de prix des forfaits qui, pour l’instant, sont véritablement rédhibitoires.
Simon Sainte Mareville