Edito – Ce dimanche 11 janvier 2015, un nombre historique de personnes se sont assemblées dans les rues de Paris et de centaines de villes en France pour rendre hommage aux victimes des attentats de cette dernière semaine et pour réaffirmer leur attachement aux valeurs de la République, au premier rang desquels la liberté.

Jamais la France n’avait vu autant de monde défiler. Et encore, « défiler » est un grand mot pour des centaines de milliers de Parisiens qui ont plutôt été contraints à rester statiques en raison d’une affluence dépassant les plus folles espérances des organisateurs. En tout, ce sont près de 4 millions de personnes qui se sont rassemblées partout en France, dont bien plus d’un million à Paris.

Tout au long de cette semaine éprouvante, des millions d’anonymes se sont retrouvés pour partager leur tristesse, leur peur mais aussi leur volonté de ne pas céder face aux attaques, de défendre par-dessus tout les valeurs qui font la force et la fierté de notre pays, celles de la liberté, de la laïcité, de la tolérance. Et le tout après une période où les divisions s’étaient faites légions, où la religion, l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle avaient été des motifs d’intolérance, de critiques violentes, voire de violences.

Les terroristes ont voulu museler la presse et stigmatiser une partie de la population, ils n’auront réussi qu’à rendre Charlie Hebdo immortel et à provoquer une unité sans précédent dans le pays. Une unité où les musulmans, les juifs, les chrétiens, les athées défilaient tous les uns à côté des autres, unis par leur appartenance au même pays, celui de la liberté de pensée et de croyance.

 

Image : Laura Bonnet / Parlons Info

Image : Laura Bonnet / Parlons Info

Alors, oui, il est peu probable que cette unité de circonstance dure éternellement. Oui, il viendra le temps des interrogations et des polémiques.

Car des interrogations et des regrets, il y en a.

On peut déplorer la façon dont le FN et certains membres du PS ont voulu politiser ce moment de communion nationale. On peut se demander pourquoi certains dirigeants connus pour leur appréciation pour le moins restrictive des droits de l’homme et de la liberté de la presse se sont retrouvés dans une marche visant à défendre entre autres la liberté d’expressions. On ne peut que regretter la façon dont certaines personnes ont prétexté ces attaques pour stigmatiser les musulmans, allant même jusqu’à des dégradations de mosquées, voire des passages à tabac. On peut aussi regretter le fait que les centaines de victimes du terrorisme qui ont péri cette semaine au Nigeria n’ont bénéficié d’une couverture médiatique que très restreinte. Il s’agira aussi de se poser les bonnes questions quant à la mise en place de moyens de prévention et de lutte – tant au niveau national qu’à l’échelle internationale – plus efficaces pour contrer les terroristes.

 

Mais pour l’instant, savourons ce moment d’union, si rare ces derniers temps. Et retenons quelques belles images. Celles de milliers de manifestants défilant sans débordement, dans un respect absolu, et sans bannières politiques ou syndicales. Celles de chefs d’Etat attendant un car, loin des exubérances protocolaires dont ils sont habitués, devenant presque comme de simples citoyens qui défilent unis contre le terrorisme.  Celles de citoyens remerciant spontanément les forces de l’ordre pour leur service et leur protection, fait plus que rare dans une manifestation.

 

Et espérons, rêvons, que cette unité nationale puisse durer encore un peu. Que cette journée soit fondatrice pour l’avenir du pays.

Car, oui, nous sommes Charlie. Mais nous sommes aussi juifs, musulmans, chrétiens, athées…

Avant tout, nous sommes tous citoyens d’un même pays. Celui des Droits de l’Homme, de la liberté de la presse. Celui où la vraie laïcité, la tolérance, le vivre-ensemble méritent d’être des valeurs fondatrices.

Tous ensemble, nous sommes la France.