C’est encore un nouveau coup dur pour le gouvernement. Après les mauvais chiffres du chômage annoncés jeudi dernier, les sages ont jugé anticonstitutionnel l’article sur la contribution supplémentaire de solidarité sur les très hauts revenus.
Une promesse- « surprise » en pleine campagne
La mesure, une promesse de campagne personnelle du candidat Hollande, lui avait permis notamment de faire l’écart face au Président-Candidat Sarkozy. Par ailleurs, elle ne figurait pas dans les 60 engagements de campagne du candidat. C’est lors d’une émission de télévision sur TF1 qu’il en révèle le contenu : « Au-dessus de 1 million d’euros par an, taux d’imposition de 75 % ». Même son conseiller chargé du budget, de la finance et de la fiscalité, Jérôme Cahuzac, actuel ministre du Budget, n’en n’avait pas eu connaissance. Bien que la mesure soit symbolique et provisoire – puisqu’elle concerne moins de 3 000 personnes -, elle a suscité une polémique auprès des artistes et des sportifs, qui se sont prononcés contre et ont demandé à en être exonérés. Mais le président Hollande a assuré qu’il n’y aurait aucune exception.
La loi de finances 2013 est adoptée par le parlement le 20 novembre dernier, intégrant la contribution qui consistera en un impôt de 18 % sur les revenus dépassant un million d’euros qui, cumulé à l’impôt sur le revenu (dont le taux d’imposition marginal est de 45 %), à la CSG, dont le taux est de 8 %, et à la taxe sur les hauts-revenus (4 % pour les personnes seules qui touchent plus de 500 000 €, ou pour les couples touchant plus d’un million d’euros), les frappent donc à 75 %. Ce qui permet à ce dispositif d’éviter de taxer le contribuable à plus de 100 % de ce qu’il gagne, et d’être jugé anticonstitutionnel.
Une loi fiscale à revoir
Pourtant, dans sa décision publiée ce samedi, le Conseil Constitutionnel, saisi par plus de 120 parlementaires, a estimé que l’article 12 « méconnait l’égalité devant la charge publique ». La base de calcul de la taxe sur les très hauts revenus pose problème car elle repose sur les personnes physique sans prendre en considération le foyer fiscal, ce que fait l’impôt sur le revenu. Ainsi, le couple dans lequel un conjoint gagne 1 100 000 € et l’autre rien est imposé à 75 %, alors que le couple dans lequel les deux conjoints touchent 900 000 € ne l’est pas. Les sages ont aussi censuré d’autres dispositions du budget 2013. L’application rétroactive (c’est à dire sur les revenus 2012) de la taxation des dividendes au barème de l’impôt est retoquée. La loi prévoyait que le paiement de l’impôt sur les dividendes – qui pouvait être soumis à une taxation à part – serve d’acompte pour l’impôt sur le revenu 2013. Mais les revenus du capital, c’est-à-dire les dividendes et certaines plus-values sur instruments financiers (actions, stock-options, etc.), qui seront perçus en 2013 seront taxés dans les mêmes conditions que les revenus du travail.
A droite, la nouvelle illustre « l’échec des huit premiers mois de François Hollande ». Jean-François Copé, le président de l’UMP parle de « faute morale » et appelle le président à « tirer les leçons de ses échecs et à changer de politique ». Gilles Carrez, député UMP, président de la commission des finances à l’Assemblée nationale faisait remarquer, au micro de France Info, que « jamais dans une loi de Finances, le Conseil constitutionnel n’avait annulé un aussi grand nombre de dispositions ». Il en appelle à une « fiscalité normale » (sic), déclarant qu’on ne peut pas « être le seul pays au monde avec une fiscalité exorbitante ». D’ailleurs un think-tank londonien prévoit que le Royaume-Uni dépassera la France en 2016 à cause de la taxe à 75 %. Mais Jean-Marc Ayrault, dans un communiqué, affirme que « le gouvernement proposera un dispositif nouveau conforme » dans le cadre de la prochaine loi de finances. Reste à savoir si celui-là ne sera pas de nouveau retoqué par les sages, du fait du caractère confiscatoire du niveau de taxation.
Marvin Nsombi