Edito – Alors que Nicolas Sarkozy annonce – sans réelle surprise – sa candidature à la présidence de l’UMP, et que la plupart des personnalités politiques semblent déjà se positionner pour la campagne présidentielle de 2017, a-t-on oublié que l’engagement des élus devrait avant tout être au service de la nation?
Le 8 mars 2012, Nicolas Sarkozy affirmait face à Jean-Jacques Bourdin sur RMC et BFMTV que s’il perdait l’élection présidentielle, il arrêterait la politique.
Le 19 septembre 2014, ce même Nicolas Sarkozy annonce sur son compte Facebook ce qui ne faisait plus l’objet du moindre doute depuis des mois: il est de retour et présente sa candidature à la présidence de sa famille politique.
La politique est devenu un métier, le pouvoir, une drogue. La défaite n’est que l’antichambre d’un retour conquérant, dans un microcosme où les nouvelles têtes se font rares. La politique est un spectacle où la communication prime sur la proposition, où le but est avant tout de remporter l’élection, puis celle d’après. Il ne s’agit plus d’élaborer un programme ambitieux, complet, avec des solutions concrètes, il s’agit avant tout de battre l’autre camp.
Le vote lui-même est devenu, dès les primaires – pour les partis qui les organisent -, une affaire de calcul politicien plutôt que d’expression de son adhésion à un projet économique, social et sociétal pour le pays. On ne vote plus pour le candidat dont on soutient les propositions, on vote pour celui qui a le plus de chance de battre untel, ou d’arriver au second tour.
La campagne de 2017 a commencé le 7 mai 2012 et le quinquennat n’est plus qu’une longue pré-campagne électorale où chacun cherche à miser sur le « bon cheval » pour essayer de garder son siège ou obtenir un poste en 2017, quitte à retourner sa veste ou à revenir sur ses déclarations antérieures. Les alliances se font et se défont, les frondes s’organisent, tout en gardant une certain prudence. Dans un pays dont la situation économique est grave, l’envie de faire des réformes ambitieuses et courageuses est tempérée par la peur d’entrainer une défaite encore plus grande pour son camp lors de la prochaine échéance électorale.
L’addiction aux sondages, un problème majeur
C’est dans ce contexte de campagne perpétuelle, que les hommes politiques et les commentateurs sont devenus « accros » aux sondages. La consultation électorale a peu à peu perdu une partie de son sens, faussée par l’ersatz de consultation d’un échantillon censé être représentatif du peuple, sur des questions parfois plus que biaisées. Gouvernements, partis et médias commandent sans compter des sondages multiples, concernant des sujets parfois bien éloignées des préoccupations réelles des Français. On en est parfois même à se demander si la jauge de réussite d’une politique est sa réussite concrète, ou juste sa capacité à faire remonter la cote de popularité du ministre qui en est à l’origine.
La prédominance des conseillers en communication, la course à la petite phrase, alliées à la nécessité pour les chaines d’information en continu de meubler des heures d’antenne, résultent en un cercle vicieux où les commentateurs donnent leur avis sur ce que pense une personnalité politique du commentaire d’un autre. Le commentaire engendre le commentaire, la moindre petite phrase, démultipliée et déformée par le prisme des réseaux sociaux, se retrouve montée en épingle. Et, dans de nombreux cas, la forme prend le dessus sur le fond.
Or, face aux difficultés de plus en plus grandes qu’ils ont à affronter, les citoyens français s’impatientent de plus en plus. Il n’est alors pas étonnant d’assister à une montée du Front national et à la diffusion de l’idée populiste du « tous pourris ». Le spectacle qu’offrent les dérapages de certaines personnalités politiques est affligeant, et les récentes affaires de fraudes fiscales, de comptabilités électorales quelque peu fantaisistes, déprécient un peu plus encore l’image déjà bien écornée de la classe politique.
Il serait toutefois erroné, et très dangereux, de se laisser tenter par une telle généralisation simpliste. S’il y a eu – et de tout temps -, des personnalités politiques qui ont cédé à la tentation des avantages que pourraient apporter leur fonction, on aurait tort d’en déduire que c’est une règle générale.
Il est vrai que les politiques semblent particulièrement déconnectés des réalités du pays, parfois plus préoccupés par leur positionnement idéologique et leurs luttes de pouvoir internes que par le redressement efficace de l’économie française. Il est aussi vrai que le retour perpétuel depuis des années des mêmes figures, qu’elles aient ou non connues un revers électoral, n’est pas le meilleur moyen de mettre en avant une réelle volonté de changement.
Il est toutefois encore possible pour la classe politique de regagner la confiance des citoyens. Pour cela, il faut que les élus comprennent que la priorité n’est pas 2017, mais bien 2014.
Il s’agit pour le gouvernement d’avoir une politique claire et courageuse, une ligne directrice dont il ne dévie pas. Et il s’agit pour les partis d’oppositions de réfléchir à de réelles propositions pour redresser le pays, de préparer un programme détaillé, ambitieux, réalisable et chiffré, afin de le présenter aux Français lors des prochaines échéances électorales, mais aussi d’être prêts à gouverner s’ils venaient à arriver au pouvoir.
Face à une situation aussi urgente, les mots et les postures ne suffisent pas, il faut des propositions et des actes. La vision à long terme doit prendre le pas sur la vision électoraliste à court terme ; le temps politique et économique doit primer sur le temps médiatique. Et la réflexion sur le programme doit précéder celle sur le candidat.