Les élections présidentielles de 2017, notamment entre les débats et les différents scandales, ont largement occupé l’espace médiatique français. De fait de l’enjeu et l’incertitude qui régnait, le choix du successeur de François Hollande était l’une des préoccupations principales des citoyens. Néanmoins, avec les rebondissements politiques qui ont eu lieu juste avant, comme le Brexit, la présence de l’extrême droite au second tour des élections présidentielles autrichiennes et autres Donald Trump, l’issue de l’élection présidentielle française était importante au-delà de l’échelon national.
Ce feuilleton politique a donc été suivi en dehors des frontières de l’Hexagone, et a été largement relayé par des médias étrangers, parfois même de manière très partisane, à l’instar des journaux russes qui publiaient des rumeurs infondées sur Emmanuel Macron. Mais comment les étrangers ont alors perçu ces élections, et que pensent-ils de la victoire d’Emmanuel Macron ? Cinq d’entre eux nous, intéressés par la politique internationales, présentent leur vision et leur opinion sur la question : Luis, un étudiant d’origine dominicaine en sismologie ; Wayne, un retraité américain ; Sara, une étudiante polonaise et Sebastiani, un jeune actif américain et YuCheng Charles, un étudiant taiwanais en échange international en France.
Ce qui ressort de leur témoignage est une certaine inquiétude face à la présence au second tour de Marine Le Pen, candidate d’extrême-droite eurosceptique, et les similitudes notable entre la candidate frontiste et le nouveau président américain. Luis par exemple, la surnomme d’ailleurs « la Donald Trump ». Pour lui, le clivage entre Macron et Le Pen se résumait à la question de l’Union Européenne et particulièrement de l’espace Schengen : il ne comprend pas la position de la candidate frontiste. Alors, pour Sara, la victoire d’E. Macron est avant tout un soulagement. Elle explique en effet que la montée de l’extrême droite en Europe est pour elle une réalité depuis que le conservateur et eurosceptique Andrzej Duda (PiS – Prawo i Sprawiedliwość [Parti Droit et Justice]) a été élu à la présidence de la République en 2015. Elle craignait de voir tomber la France -ainsi que les pays de l’Ouest de l’Europe- dans l’extrême droite. Pour Sebastiani, Marine Le Pen avait des positions trop radicales à son goût sur l’euro mais surtout sur la question des migrations : il souligne d’ailleurs que l’islamophobie de la candidate l’a marqué, et évoque d’ailleurs le « muslim ban » de Donald Trump. Wayne affirme d’ailleurs que « lorsque les élections américaines se sont rapprochées, il y a eu une attention grandissante pour Marine Le Pen, qui proposait des politiques similaires à celles des soutiens les plus à droite de Donald Trump » et ajoute d’ailleurs que les journalistes américains –du moins les plus progressistes- comparaient souvent Marine Le Pen, Donald Trump et le Brexit, et espèrent que la défaite du Front National en France « est le début d’un recul de ce populisme plein de colère et peu profond ».
Il est également intéressant de voir qu’Emmanuel Macron est relativement méconnu, ce qui s’explique par sa récente arrivée sur la scène politique française. Sebastiani fait d’ailleurs la comparaison avec les élections américaines : il explique avoir peu entendu parler des propositions d’Emmanuel Macron, mises au second plan par rapport à la couverture médiatique dont bénéficiait Marine Le Pen, comme les propos d’Hillary Clinton disparaissaient derrière les frasques de Donald Trump. Wayne explique que les médias par lesquels il suivait l’élection (notamment le New York Time, et le Washington Post) présentaient Macron comme un centriste, ce qui le réjouit : il lui souhaite d’ailleurs « bonne chance, puisqu’il n’a pas le soutien des anciens partis de gouvernement français » ; comme le rappelle YuCheng Charles « c’est la première fois qu’il y a pas l’un des deux grands partis de gauche ou de droite qui gagne ». D’autre part, l’étudiante polonaise, Sara, précise que la proposition de Macron qui l’a le plus marquée est celle de l’accueil des scientifiques du monde entier, notamment américains, pour continuer le travail de recherche sur les questions de transition écologique et de développement des énergies renouvelables, notamment après l’annonce de Donald Trump de remettre en question l’accord de la COP 21 -annonce peu médiatisée en France. Elle souligne, tout comme Luis, le renouvellement politique qu’incarne Macron par sa qualité de plus jeune Président de la Vème république, même si l’étudiant dominicain reconnait qu’il « ne connaissait pas son nom ». Enfin, pour YuCheng Charles, qui étudie en France et qui a suivi les élections en regardant des débats à la télévision française, en listant des journaux comme le Figaro et le Monde, et en allant à un meeting de Macron, ce jeune Président Français saura « créer plus d’opportunités pour les emplois et résoudre les problèmes de chômages petit à petit ».
Les avis quant à l’importance de cette élection divergent, logiquement. En effet, les Américains soulignent le lien entre les Etats-Unis et l’Europe : Wayne explique que la France pourrait se renforcer économiquement et politiquement avec Macron, ce qui favorisera la stabilité européenne, et profitera, in fine, aux Etats-Unis, en affaiblissant Trump. Sebastiani souligne que « la majeure partie des décisions nationales prises par les personnes les plus haut placées ont, par ricochet, des effets internationaux, et notamment sur les classes les plus défavorisées. » A l’inverse, Luis considère que l’Union Européen et le cas français ne le concerne pas vraiment : selon lui, la République Dominicaine, son pays, n’a que très peu de relations avec la France. YuCheng Charles, ne croit pas que l’élection de Macron « va causer des impacts pour la politique de [la Chine]. Cependant, il aura plus de coopération étroite avec l’Allemagne après le Brexit. » Il fait notamment référence à la proposition d’une coopération entre la France et la Chine qui «se tient prête à travailler avec la France afin de faire progresser le partenariat stratégique franco-chinois à un niveau supérieur » selon Xi JinPin, le Président Chinois.
Ainsi, ces élections nationales ont également eu une envergure internationale. Toutefois, notre nouveau Président semble relativement méconnu -ou du moins mal connu- en dehors de la France : il va alors devoir s’affirmer comme chef d’Etat à l’étranger pour assurer une véritable stature internationale.
Caroline Vandenbussche & Mathilde Piriou-Guillaume